Le CICE où la dilapidation des emplois et des finances publiques

1 million d’emplois par an…

C’est l’équivalent-coût du financement du CICE alors qu’il devait apporter emplois et compétitivité pour les entreprises françaises. Or non seulement ça n’a pas été le cas mais en plus son financement, à coup de dizaines de milliards d’euros, aurait pu créer 1 million d’emplois par an. Après s'être attachés à démonter ce point, nous pourrons l'illustrer avec le cas Bridgestone, puis nous verrons que notre appartenance à la zone euro n'est – encore une fois – pas neutre du tout...

Qu’est-ce que le CICE ?

Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) a pour objet de financer les dépenses des entreprises par un allègement des cotisations sociales sur la rémunération des salariés. C'est donc un avantage fiscal qui permet de mobiliser une somme normalement dédiée aux impôts pour l'allouer à des dépenses type investissement, recherche ou innovation.

Le calcul du CICE est réalisé en prenant en compte l’ensemble des rémunérations versées aux salariés pendant une année civile. Toutes les rémunérations qui n’excèdent pas 2,5 fois le SMIC sont intégrées. (1)

Depuis le 1er janvier 2019, le CICE a été transformé en un allègement de cotisations sociales pérennes et à effet immédiat. (2)

Faute de transparence, on ignore précisément le montant reçu par chaque grande entreprise. On s’aperçoit par contre que la plupart d’entre elles auraient quand même réalisé d’importants bénéfices, même sans le CICE. Six millions d’entreprises ont profité de cet allègement de cotisations.

Si une majorité d’entre elles emploient moins de vingt-cinq salariés, la moitié de la masse financière revient en fait aux plus grosses entreprises alors même qu’elles sont moins fragiles que les petites entreprises et affichent pour la plupart des bénéfices sans commune mesure avec les sommes perçues au titre du CICE. Des grands groupes comme Carrefour, Auchan, Michelin ou les ex-entreprises publiques comme la Poste, la SNCF, Air France en ont carrément profité pour réduire en masse leurs effectifs. On se souvient par exemple des 2900 postes supprimés d’AirFrance qui vaudront au DRH du groupe une chemise arrachée alors que l’entreprise a touché 109 millions d’euros du CICE en 2013 et 2014.(3)

On peut prendre aussi comme exemple Total, qui a enregistré un profit de 4,2 milliards d’euros après avoir reçu 29 millions de CICE, et dont le PDG touche entre 3 millions et 4 millions d’euros par an.

Les actionnaires sont donc les grands gagnants de cette réforme de ce dispositif fiscal qui a coûté environ 18 milliards d'euros par an aux finances publiques et donc aux contribuables français ! (4)

L’étendue du désastre

Un rapport paru mi-septembre 2020 montre l'ampleur de la supercherie : Selon France Stratégie, une institution liée au Premier ministre, le CICE a créé environ 100 000 emplois en cinq ans (entre 2013 et 2017) pour plus de 89 milliards d'euros de deniers publics dépensés sur la même période ! (5)

On est loin, très loin du million d’emplois promis par Pierre Gattaz l'ex-patron du Medef avec pourtant des sommes investies pharaoniques. (6)

Pour comprendre l’étendue du désastre de cette mesure regardons le Smic mensuel français, il est de 1201 euros net par mois pour 35 heures soit 1521 euros brut c'est-à-dire avec les cotisations sociales.

Avec ce montant de SMIC, les 18 milliards d’euros par an, correspondent à 986 193 emplois payés au SMIC, par an !

18 milliards pour le CICE par an cela représente tout de même 1,4% de la dépense publique ce qui aurait pu financer quasiment 1 million d’emplois par an.

Cette capacité d'emplois nous aurait été bien utile pour soulager nos infirmières, nos aides-soignantes, nos enseignants, nos professeurs, nos pompiers, nos policiers, nos chercheurs, nos militaires, nos éboueurs, nos fonctionnaires, nos formateurs …

Et aussi pour remplacer nos départs à la retraite.

L’exemple frappant de Bridgestone

Revenons au CICE en prenant un exemple sur l’actualité récente : le pneumaticien Bridgestone a bénéficié en 2018 du versement d'argent public au titre du CICE, soit 1,8 million d'euros. Le fabricant de pneus japonais a annoncé, en septembre 2020, le projet de fermeture de son usine de Béthune, dans le Pas-de-Calais, à horizon de l’année 2021 soit 5 000 emplois qui seront supprimés si l’on compte les sous-traitants auxquels il faudra ajouter tous les emplois indirects.

Xavier Bertrand président de la région Hauts-de-France, que l’on voyait s’indigner sur les plateaux de télévisions et radios suite à cette annonce, a versé 620 000 euros d'aide de sa région pour la formation des salariés et la modernisation du site. La communauté d'agglomération de Béthune avait déjà donné presque 1,2 million d'euros au groupe japonais, à cela s'ajoute 500 000 euros de l’Union européenne via les fonds européen FEDER ainsi que 320 000 euros de l'État.

Plus récemment toujours dans le cadre du programme européen FEDER, 24 millions d'euros ont été investis dans une usine Bridgestone mais en … Pologne (pays hors zone euro), ce qui représente une participation de 2,88 millions d’euros dépensée par la France.

Au total, les aides publiques françaises depuis 2008 avoisinent 7,3 millions d'euros rien que pour Bridgestone. (7)
 

Les contribuables français financent la Pologne (et d’autres pays dont les pays de l’est) via Bruxelles pour … délocaliser les usines françaises !

Du point de vue de la France c’est une perte d’emplois et d’argent publique, du point de vue de Bruxelles et des mondialistes c’est un gain de compétitivité et donc de bénéfice pour les actionnaires, du point de vue de l’UPR c’est aussi une escroquerie. On ne peut pas défendre « en même temps » l’Union européenne et la France, c’est l’un ou l’autre puisque à travers cet exemple on comprend que nous n’avons pas les mêmes intérêts.

Si l'on compare avec la Suisse, cette dernière protège ses emplois et son économie en taxant les marchandises qu’elle produit, chose impossible à faire dans cette supra-nation européenne de libre-échange total ! En plus du Smic le plus élevé du monde, la Suisse a un taux de chômage de 3,3 %.

Le dogme européiste que la France est « trop petite pour…» tombe une fois de plus à l’eau.

Quid de l’euro grand absent du débat ?

Maintenir les emplois à coups de subventions publiques sans aucune garantie est un échec : plus d’1,1 million d’emplois ont disparu dans l’industrie en France depuis le traité de Maastricht.

L’argent publique est dilapidé par des européistes arc-boutés dans leur idéologie, occultant que le problème de la perte de compétitivité de nos entreprises est lié à un euro trop élevé par rapport à notre économie.

L’euro (trop cher) et l’Union Européenne (qui laisse entrer les pneus à bas coûts chinois et sud-coréen) ont tué cette usine de fabrication de pneumatiques. (8)

L’euro, toujours absent des débats, parlons-en : l’euro-système est un système monétaire où les taux de change des différentes monnaies ont été arbitrairement figés. Cependant les raisons économiques qui poussent aux évolutions divergentes de leur taux de change n’ont pas disparu et continuent à agir.

Ces forces économiques ont dû trouver un autre exutoire que l’euro non dévaluable : afin d’être « compétitif » les gouvernements successifs sacrifient nos acquis sociaux issus du CNR en prenant des lois qui sont un véritable retour au XIXème siècle : loi Sapin, loi Macron, CICE, pacte de responsabilité et de solidarité, loi travail, loi travail XXL, ubérisation…

Le tout inscrit dans les Grandes Orientations de Politique Économique, les GOPÉs, qui sont des « recommandations » (en réalité des obligations car sanctionnables) de politique économique et sociale émises par la Commission européenne — non élue — à chacun des 27 États membres. (9)

Conclusion :

Non seulement le CICE n’a pas tenu les promesses de créations d’emplois, mais en plus son financement aurait pu en créer près d’un million, et enfin il n’empêche en rien les délocalisations. Malheureusement le cas de Bridgestone n’est pas un cas unique. On se souvient par exemple de Whirpool, Continental, Renault, PSA, Michelin, Arcelor, Castorama, BIC, Brico Dépôt, Amora, Latécoère, Haier, ou l’industrie du textile dont Vivarte ou Happychic, un véritable désastre industriel rendu possible à cause de l’article 63 du Traité de Fonctionnement de l’Union européenne qui interdit toutes restrictions aux mouvements de capitaux, dont visiblement seuls les adhérents et sympathisants de l’UPR connaissent ! (10)
Encore un example récent de délocalisation : le fabricant de panneaux solaires Maxeon-SunPower, filiale du groupe Total ferme sa dernière unité de panneau solaires en Moselle, elle est désormais gérée depuis Singapour ! Elle est cotée au Nasdaq, et a fermé en 2021 son usine de Toulouse et concentre l'essentiel de sa production en Malaisie et au Mexique. Dernière entité européenne du groupe, le site de Porcelette devait lancer en 2021 la production d'un nouveau panneau élastique ultrafin. Maxeon Solar y a finalement renoncé.

 

Tous les politiciens de droite comme de gauche, du NPA au RN (François Ruffin, Xavier Bertand, Philippe Poutou, Nicolas Dupont-Aignan ou Marine Le Pen pour ne citer qu’eux) pleurnichent à tour de rôle sur les conséquences des délocalisations sur les plateaux de télévisions où ils ont leur rond de serviette. Ils vocifèrent plus fort que leur voisin surjouant le « avec moi ça n’arriverait pas » et sont complices de près ou de loin de cette arnaque car aucun, je dis bien aucun, n’explique aux Français les deux véritables causes de ce suicide industriel que sont notre appartenance à l’Union européenne et à l’Euro.

Il n'y a pas d'autre solution que de se libérer de ces deux carcans. Seule l’Union Populaire Républicaine s’y emploie depuis plus de 13 ans au prix d’une censure médiatique terrible mais avec de la constance et du courage politique.

À méditer pour les présidentielles de 2022...

 

Patrice CALI

Membre du Bureau national de l’UPR

Responsable national en charge du secteur public


Sources :

(1) : https://www.compagnie-fiduciaire.com/nos-solutions-et-services/fiches-conseils/comprendre-sa-fiscalite/cice-credit-dimpot-pour-la-competitivite-et-lemploi/

(2) : https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/F31326

(3) : https://rapportsdeforce.fr/classes-en-lutte/ces-entreprises-qui-empochent-les-milliards-du-cice-en-licenciant-11064797

(4) : https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/01/09/pme-ou-entreprises-du-cac-40-qui-beneficie-des-20-milliards-du-cice_5406893_4355770.html

(5) : https://www.strategie.gouv.fr/publications/evaluation-credit-dimpot-competitivite-lemploi-synthese-travaux-dapprofondissement

https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/fs-_rapport_cice-2018-02-10.pdf

(6) : https://www.ue35.fr/wp-content/uploads/2013/10/Lettre-1-million-d-emplois_MEDEF2013.pdf

(7) : https://www.lci.fr/population/fermeture-de-bridgestone-combien-d-argent-public-l-usine-avait-elle-touche-2164841.html

(8) : https://www.upr.fr/actualite/lue-et-leuro-sont-directement-a-lorigine-de-la-fermeture-de-lusine-bridgestone-de-bethune-encore-5000-emplois-sacrifies-a-lideologie-europeiste/

(9) : https://www.upr.fr/actualite/20-mai-2020-les-gope-pour-2020-et-2021-viennent-detre-publiees-par-la-commission-europeenne-sous-couvert-dadaptation-conjoncturelle-a-la-pandemie-elles-confirment-que-ri/

(10) : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/ALL/?uri=CELEX%3A12008E063

 

  • 1 vote. Moyenne 5 sur 5.